Brèves du cahier n°37

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Qui a voté au Parlement européen?

Dans la résolution du Parlement Européen adoptée le 11 mars 2021 sur le Semestre européen (aspects liés à l’emploi et à la politique sociale dans la stratégie annuelle 2021 pour une croissance durable), un amendement présenté par le groupe LEFT a été adopté. Celui-ci souligne que s’attaquer à la pandémie constitue une condition préalable au redressement économique et social et à l’efficacité des efforts de relance; il se félicite de la mise au point de vaccins contre la COVID-19, mais s’inquiète vivement des cas graves de non-respect des calendriers de production et de livraison; il demande que les vaccins contre la COVID-19 soient considérés dans la pratique comme des biens publics garantis à tous; il invite la Commission et les États membres à surmonter les obstacles et les restrictions liés aux brevets et aux droits de propriété intellectuelle afin de garantir que les vaccins soient produits en grandes quantités et distribués en temps opportun à tous les pays et à tous les citoyens.

Les verts, le PS et la GUE ont voté pour, LREM et LR se sont abstenus, et le RN a voté contre.

Pour lire la résolution complète: Textes adoptés – Semestre européen: aspects liés à l’emploi et à la politique sociale dans la stratégie annuelle 2021 pour une croissance durable – Jeudi 11 mars 2021 (europa.eu)

La fin des titulaires de la fonction publique?

Depuis 15 ans le nombre d’agents de la fonction publique contractuels est passé de 755307 en 2005 à 1125900 en 2019 soit une augmentation de 49%. Leur part est passée à 19,9% en 2019 contre 14,3% en 2005. Le rythme s’accélère, plus 5% depuis 2017 notamment du fait de la reconversion des emplois aidés. C’est le modèle allemand qui s’impose en réservant le statut aux seuls agents des fonctions régaliennes et d’autorité. Cela correspond aussi aux choix de la Commission européenne et de la Cour de justice de l’UE. Cette position est défendue par les Républicains, les centristes et La REM. Lors de son discours devant les 600 plus hautes cadres de la fonction publique, le président Macron s’est félicité que les emplois de directions soient largement ouverts aux personnes issues du secteur privé. Pour eux, le principe de l’emploi permanent dans la fonction publique est terminé. De même un fonctionnaire pourra être détaché d’office vers une entreprise privée qui assume une mission de service public : c’est ce que prévoit la loi de 2019 sur la fonction publique. La logique statutaire de 1946 disparaît progressivement.

Alerte sur les nouvelles formes de cannabis

Des produits beaucoup plus concentrés entraînant une accoutumance et une dépendance plus importantes apparaissent sur le marché. Le tétrahydrocannabinol (THC) est plus concentré. Et de nouveaux produits de synthèse apparaissent. La concentration est passée de 6 à 8 % (début des années 2000) à maintenant à 11% en moyenne. On a même vu des taux de 28% en 2019. Quand au nouveau BHO (butane hash oil) il est livré sous forme huileuse pouvant atteindre 80% de THC ; et un gel en seringue monte à 91%… Les consommateurs ne sont pas toujours avertis des doses qu’ils consomment et peuvent se retrouver dans des situations catastrophiques. Parfois c’est même un cannabinoïde de synthèse qui est proposé : le MDMB-4en-Pinaca. C’est le cannabis puissance 100 comme le déclare la présidente du Réseau français d’addicto-vigilance. Avec ces produits on peut avoir des crises d’agressivité sévères, des AVC, des infarctus et des décès (12 cas de décès en 2019 et 2020 dus au MDMB mélangé à de l’herbe). Les premiers cannabinoïdes de synthèse sont apparus en 2008 et sont fabriqués en Asie. On en connaît maintenant plus de 68 formes en France. Plus la concentration est élevée, plus la dépendance est grande et les risques élevés. Dans ces conditions la vente libre du cannabis que certains proposent est complètement décalée et ne réduira pas la consommation bien encadrée par un marketing criminel.

Question d’éthique: le problème des chimères homme / animal

Les chimères biologiques sont des créations de laboratoire qui fusionnent des patrimoines génétiques pour créer de nouveaux êtres. Jusqu’à maintenant, c’était relativement interdit. Une nouvelle expérimentation a créé un embryon de macaque porteur de cellules humaines. Deux équipes, l’une française, l’autre sino-américaine l’ont réalisée. Une première étude a été publiée le 12 janvier dans la revue Stem Cell Reports. Selon Pierre Savatier (INSERM Lyon) une chimère est «une entité biologique fabriquée par l’homme où l’on mélange volontairement deux types de cellules, porteurs de génomes différents». Ces deux expériences ont utilisé des cellules humaines iPS pluripotentes induites c’est à dire reprogrammées pour donner ensuite n’importe quel type de cellules humaines. L’expérience faite avec des singes marche mieux qu’avec d’autres espèces et permet le développement jusqu’à 19 jours après la fécondation (moment où commence à se développer l’invagination de la plaque neurale qui est l’organe qui de viendra le système nerveux). Plusieurs lignes rouges méritent réflexion : la contribution des cellules humaines à la formation du cerveau de la chimère, la formation de gamètes et l’apparence de l’animal. La possibilité d’implanter un tel embryon dans un utérus n’est pas encore réalisée mais est une perspective réelle compte tenu de la rapidité du développement de ces sciences. Une modification des lois de bioéthique est envisagée pour autoriser ces pratiques. Une délibération publique est pour le moins essentielle. Maîtrise-t-on les risques ? Apparition de nouvelles zoonoses, risque de représentation humaine chez l’animal, risque de conscience (migration de cellules humaines dans le cerveau) ? Nous avions déjà évoqué ces questions dans des numéros précédents des Cahiers mais une nouvelle étape semble franchie. Où nous emmène la technique ?

La question de la reconnaissance de la Covid 19 comme maladie professionnelle

Nous avions attiré l’attention dans le numéro précédent de l’importance de pouvoir déclarer comme maladie professionnelle la Covid 19 en particulier chez les soignants. Le tableau des maladies professionnelles a été complété comme il se devait mais les conditions d’admission sont très restrictives. Ainsi au 26 février seules 408 personnes avaient obtenu une réponse favorable au titre de ce tableau sur 35000 dossiers complets. Le caractère d’automaticité est abandonné. Les personnes qui n’entrent pas dans les critères du tableau peuvent s’adresser à un comité d’experts indépendants : le comité a pris 29 décisions positives et a rejeté une candidature. La CGT considère qu’il y au moins 16000 victimes. Beaucoup de personnes dans ces conditions ne déclarent pas leur maladie.

L’ostéopathie est un placebo

Le Pr Rannou, chef de service à l’hôpital Cochin a publié dans le JAMA une étude sur 10 ans portant sur 400 malades souffrant de lombalgies qui montre que les séances d’ostéopathies n’ont pas plus d’effet qu’un placebo. C’est un problème considérable car le développement de ces pratiques est exponentiel. 26222 praticiens sont recensés dont 14953 sont en pratique exclusive. La demande des patients augmente en proportion de la baisse du nombre de médecins disponibles pour les prendre en charge. En 2015, 26 millions de consultations ont été notées. C’est en France que la densité d’ostéopathes est la plus élevée au monde. Ces actes ne sont pas remboursés par la Sécurité sociale et les tarifs ne sont pas encadrés. Parfois l’addition est salée. Comment comprendre l’attrait des patients dans ces conditions ? Qu’en penser ?

Quelques données chiffrées pour réfléchir sur le problème de l’industrie pharmaceutique

Nathalie Coutinet, économiste de la santé et membre des économistes atterrés lors d’un webinaire organisé le 5 mars 21 par Convergence des services publics sur le thème «pôle public du médicament » a donné quelques chiffres qui donnent à réfléchir :

  • D’après la Commission européenne, sur la période 2000-2007, 23 % du chiffre d’affaires des firmes pharmaceutiques au niveau mondial ont été consacrés à la promotion, versus 17 % à la recherche et au développement.
  • En France, les dépenses de promotion ont augmenté de 48 % en euros courants entre 1999 et 2005.
  • Entre 1999 et 2017, le chiffre d’affaires des onze plus gros laboratoires a été multiplié par deux, pour atteindre la somme record de 395 milliards d’euros en 2017.
  • Parallèlement, la valeur de leurs actifs a été multipliée par 3,3 pour atteindre 873 milliards d’euros.
  • Les dividendes et rachats d’actions – autrement dit la part des profits directement redistribués aux actionnaires – ont été multipliés par 3,6 pour atteindre 71,5 milliards d’euros en 2017 – alors que les bénéfices nets n’ont augmenté « que » de 44 % sur la même période.
  • Pour les sept laboratoires que l’on peut suivre depuis 1990, les hausses sont encore plus spectaculaires. Leur chiffre d’affaires cumulé a été multiplié par plus de six, leurs bénéfices par cinq, leur actif par plus de douze de même que leurs dividendes et rachats.
  • En 2017, les labos ont redistribué près de 142 % de leurs profits aux actionnaires.
  • Les crédits publics consacrés en France à la santé sont deux fois inférieurs à ceux de l’Allemagne et ils ont diminué de 28 % entre 2011 et 2018, quand ils augmentaient respectivement de 11 % outre-Rhin et de 16 % au Royaume-Uni.
  • Le dispositif Covax, a réservé 1120 millions de doses pour 92 pays en développement (soit une population de 3,9 milliards). Vaccin qui nécessite deux doses : 560 millions de personnes pourront être vaccinées.
  • Autre façon de voir les choses : les Etats-Unis ont réservé 2,6 milliards de doses pour une population de 350 millions d’habitants, Covax 450 millions de doses pour une population de 4 milliards de personnes !
  • L’UE a commandé 1585 millions de doses : l’Union africaine 670 millions