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Refonder le secteur psychiatrique

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Résumé :
L’auteur appelle à ce qu’une concertation de toutes les sensibilités du Nouveau Front Populaire soit organisée pour réfléchir à la question de l’organisation de la psychiatrie en France. Elle propose une loi-cadre pour la refondation du secteur psychiatrique public. Il s’agit que le Centre Médico-Psychologique soit la porte d’entrée unique du système. En ce qui concerne la pédopsychiatrie, l’Intersecteur infanto-juvénile doit être la pierre angulaire de l’organisation des soins.

Abstract :
The author calls for a consultation of all the sensibilities of the New Popular Front to be organized to reflect on the question of the organization of psychiatry in France. She proposes a framework law for the reestablishment of the public psychiatric sector. The aim is for the Medico-Psychological Center to be the single entry point for the system. With regard to child psychiatry, the Child and Adolescent Intersector must be the cornerstone of the organization of care.

Chaque année la période estivale est la plus éprouvante pour les salariés au sein de l’hôpital.

En octobre 2023, le groupe des députés du Parti Socialiste avait présenté une proposition de loi visant à prendre dix grandes mesures pour la santé mentale. La dissolution de l’Assemblée nationale n’a pas permis l’examen de ce texte.
Une année plus tard, les députés socialistes, utilisant leur niche parlementaire du 12 décembre 2024, envisagent une proposition de loi visant à former les jeunes de 16 à 25 ans aux premiers secours en santé mentale. De portée limitée, ce document a le mérite de prendre au mot Michel Barnier, lequel a promis d’ériger la santé mentale en cause nationale.

Lors de cette nouvelle législature, avant de proposer une nouvelle loi concernant les soins psychiques, il est souhaitable qu’une concertation de toutes les sensibilités du Nouveau Front Populaire soit organisée.
Aussi, j’aimerais évoquer dans ces colonnes les principales propositions que nous, communistes, souhaitons apporter au débat.

Tout d’abord, plutôt qu’une loi de programmation, nous proposons une loi-cadre organisant la refondation du Secteur, dont les fondements philosophiques ont été dénaturés au fil des réformes successives.
Tout d’abord, le Secteur psychiatrique public doit être plus clairement identifié comme le socle de toute prise en charge. En effet, dans l’intérêt des patients, c’est la même équipe qui doit assurer une continuité des soins : prévention, soins, post-cure.

Chaque Secteur comprendra une zone géo-démographique d’environ 75000 habitants et il  aura l’obligation de prendre en charge toutes les demandes de soins psychiques de la population de référence; le patient ayant par contre le libre choix de son lieu de soins, excepté dans les cas de soins sous contrainte.

Bien entendu, les soins ambulatoires sont à privilégier. Ils doivent être organisés autour du Centre Médico-Psychologique, porte d’entrée unique.

Des moyens en terme de personnels et de finances sont nécessaires pour favoriser ce type de prise en charge : ouverture de nouveaux lits d’hospitalisation si nécessaire, de Centres d’Accueil de Crise (CAC), de Centres d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel (CATTP),  d’hôpitaux de jour, organisation de Visites A Domicile (VAD), déploiement de Clubs thérapeutiques.

Le Secteur est un parcours de soins spécifique au champ de la santé mentale ; ce qui exclut les logiques de séquençage de la maladie et de segmentation des prises en charge.

En ce qui concerne la pédopsychiatrie, l’Intersecteur infanto-juvénile doit être la pierre angulaire de l’organisation des soins.

La population d’un intersecteur doit comprendre environ 200 000 habitants et cette structure doit être dotée de 3 Centres Médico-Psycholopgiques ou CMP, 2 Centres d’Accueil Thérapeutique à Temps Partiel (CATTP), 2 hôpitaux de jour et 2 unités de 10 lits d’hospitalisation à temps complet.

L’équipe doit être pluridisciplinaire : Pédopsychiatres, psychologues, cadres de santé de proximité, infirmiers, assistantes sociales, secrétaires, ASH, psychomotriciens, orthophonistes, éducateurs, un professeur des écoles. Selon la spécificité de la structure, l’équipe est complétée par des aides soignants et autres professionnels.

Nous demandons l’abrogation du décret 2021-1255 relatif à la réforme du financement des activités de psychiatrie qui favorise les thérapies brèves et non les traitements de fond.

Nous refusons le morcellement des soins en plateformes « spécialisées » sur des symptômes (tels que l’hyperactivité…)

Nous exigeons l’arrêt de la politique d’appels à projets qui met en concurrence les services entre eux

La psychiatrie n’est pas une spécialité médicale comme les autres, c’est une discipline spécifique. Tous les soignants exerçant en psychiatrie doivent donc bénéficier d’une formation adaptée. Cette formation doit permettre d’appréhender les différentes approches théoriques qu’elles soient issues de la biogenèse, de la psychogenèse ou de la sociogenèse sans exclusive les unes des autres.

Ce qui implique :

  • Le rétablissement de l’Internat en psychiatrie.
  • Pour la filière infirmière, un diplôme en chandelier avec une option psychiatrie. Tous les primo arrivants doivent effectuer un stage complémentaire associant immersion dans les unités et enseignement théorique aux approches bio, psycho, sociales. Les études de la filière infirmière sont rémunérées sur la base de 90% du 1er échelon du grade.

Toutes ces propositions doivent être financées. La psychiatrie doit faire l’objet d’une  ligne budgétaire spécifique dans les comptes de la Sécurité Sociale ce qui permettra de suivre l’évolution en Euros constants des ressources allouées, à commencer par les moyens supplémentaires pour mettre en œuvre cette Loi.

Bien entendu, une réforme du financement de la Sécurité sociale doit accompagner cette loi-cadre. Son financement doit être fondé sur les seules cotisations sociales, élargies aux revenus financiers.