Les praticiens des centres de santé veulent des manipulateurs-radio en pratiques avancées

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Dans une lettre adressée au ministre de la Santé, les praticiens exerçant dans les centres de santé et les représentants des manipulateurs radio réclament la création d’un statut de manipulateur en pratiques avancées. Selon eux, elle pourrait remédier à la pénurie de personnel dans les centres dotés d’un service d’imagerie médicale.

Les praticiens qui exercent dans les centres de santé souhaitent étudier la possibilité de créer un statut de manipulateur en pratiques avancées. C’est ce que révèle une communication de l’Association française du personnel paramédical d’ électroradiologie ( AFP PE), du 24 janvier   dernier. Cette évolution permettrait de combler les besoins en radiologie dans les centres de santé, confrontés à des difficultés liées notamment à la pénurie de radiologues et de manipulateurs radio, selon l’AFPPE.

Une « question de survie »

Les principales associations de praticiens de centres de Santé défendent cette solution dans une lettre commune au ministre de la Santé, Olivier Véran. Parmi les signataires figurent la Fédération nationale des centres de santé (FNCS), l’Union syndicale des médecins de centres de santé (USMSC), et l’Institut Jean-François Rey (IJFR), conjointement avec le Conseil national professionnel des MERM (CNPMEM). « C’est pour nous une question de survie des services d’imagerie dans les établissements, sachant les difficultés qui existent depuis des dizaines d’années en termes de recrutement de radiologues et de manipulateurs. Sinon, nous n’aurons plus qu’à proposer à nos gestionnaires de fermer les services d’imagerie. Ça sera un pan de l’offre de soins qui s’écroulera », constate Frédéric Villebrun, président de l’Union syndicale des médecins de centres de santé (USMCS). « Nous avons tenu depuis quelques années avec les moyens du bord malgré les difficultés, mais nous sommes arrivés à une limite », déplore-t-il.

Les protocoles de coopération, un premier pas vers les pratiques avancées ?

D’après Séverine Moynat, présidente du CNPMEM, le protocole de coopération entre radiologues et manipulateurs formés à l’échographie initié par l’article 51 de la loi HPST de 2009 serait un premier pas vers la pratique avancée que réclament les praticiens. Selon un rapport publié par l’Inspection générale des affaires sociales en 2020, « les objectifs affichés dans le protocole visent à répondre aux incidences de l’évolution démographique négative des médecins radiologues et à une demande croissante des actes d’échographie ». Il permet ainsi toujours selon l’IGAS, « d’améliorer la prise en charge des patients, tant en termes d’accès qu’en termes de continuité et de coordination des soins ». Les manips qui adhèrent à ces protocoles exercent toutefois sous une supervision médicale. Le rapport de l’IGAS précise en effet que « le radiologue valide l’indication de l’examen et en détermine le protocole d’exploration ».

Des pré-comptes rendus

Mais dans les faits, selon Séverine Moynat, les manipulateurs formés à l’échographie seraient quasiment tous amenés à établir un pré-compte rendu, validé dans plus de 80% des cas, par le médecin responsable en charge de la relecture. « À partir du moment où des manipulateurs ont la capacité de faire ce travail, grâce à une formation complémentaire, sans besoin de radiologues à proximité, cela veut dire que ça répond effectivement à un besoin qui est important », explique Séverine Moynat.

« Nous souhaitons une avancée législative »

Cependant ce protocole de coopération pour les manipulateurs formés à l’échographie, ne serait en l’état actuel pas suffisant, estime Frédéric Villebrun : « Les praticiens ne peuvent pas bénéficier de la pleine utilité de ces manipulateurs radios formés à l’échographie tant que les comptes rendus sont obligatoirement validés par les radiologues. Nous souhaitons une avancée dans la législation pour permettre aux manipulateurs de gagner en autonomie ».

 Les radiologues absents des pourparlers

Les radiologues n’ont pas signé la lettre adressée au ministre de la Santé. « Cette évolution n’a pour le moment pas trouvé écho auprès des représentants des radiologues », indique l’AFPPE. Cette démarche requiert pourtant, selon Séverine Moynat, un travail en partenariat avec tous les acteurs de la radiologie. Une position que défend également Frédéric Villebrun. « Nous souhaitons construire un projet avec les radiologues libéraux car nous pensons que c’est dans l’intérêt de l’ensemble des structures et des corps de métier liés à l’imagerie médicale d’avancer sur ce sujet. Nous connaissons les réticences mais ce n’est pas une solution de rester sur un statut quo. »

 Des incertitudes planent autour du développement des MPA.

Le ministre de la Santé Olivier Véran n’aurait pour l’heure pas donné suite au courrier. Pour autant, Séverine Moynat, se montre confiante : « Olivier Véran à l’air de soutenir les coopérations interprofessionnelles. Dans plusieurs rapports parlementaires, la porte a été ouverte aux manipulateurs radio pour faire suite aux infirmières sur les pratiques avancées. » Se pose également la question du développement des formations de manipulateurs en pratiques avancées. « Les instituts de formation vont voir les conseils régionaux pour essayer d’augmenter leur nombre d’étudiants. Nous avons besoin aussi d’avoir une perspective en aval de toutes ces formations pour offrir des projets professionnels à tous ces manipulateurs qui pourraient arriver sur le marché du travail », affirme Fréderic Villebrun.